Les groupes canadiens de défense des droits humains et des travailleurs et travailleuses n’appuient pas le projet de loi S-211 sur la déclaration de l’esclavage moderne. Pourquoi ? Parce qu’il n’est pas assez robuste pour lutter contre les abus des entreprises. Il existe un meilleur projet de loi déposé au Parlement : le projet de loi C-262.
En avril 2022, le projet de loi S-211, la Loi sur la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants dans les chaines d’approvisionnement (ou « projet de loi sur les déclarations concernant l’esclavage moderne »), a terminé son parcours au Sénat. Il est maintenant examiné par les députés canadiens.
Par son titre, on pourrait s’attendre à ce que les organisations de la société civile et les syndicats canadiens soient en première ligne pour aider à mobiliser le soutien en faveur de ce projet de loi. Alors pourquoi ne le sont-ils pas ?
La raison est simple : le projet de loi S-211 est une diversion. Il n’apporterait rien à la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants dans les chaînes d’approvisionnement canadiennes ; il ne toucherait pas aux autres violations graves des droits humains, notamment le harcèlement, les meurtres et les viols collectifs liés aux activités des entreprises canadiennes à l’extérieur du Canada, et ne s’attaquerait pas non plus aux graves dommages environnementaux et à la contamination de l’eau qui y sont associés ; enfin, il n’aiderait pas les personnes lésées par les entreprises canadiennes à obtenir réparation. Le projet de loi S-211 exigerait seulement que les entreprises déclarent si elles ont pris des mesures pour identifier et examiner la présence de travail forcé dans leurs activités, et fassent rapport sur ce qu’elles ont découvert.
De plus, en donnant l’impression que le gouvernement prend des mesures, le projet de loi S-211 pourrait freiner l’engouement croissant au Canada pour véritablement mettre fin aux abus des entreprises à l’étranger. Les Canadiens et Canadiennes sont de plus en plus préoccupés par les graves préjudices liés aux produits qu’ils achètent et exigent que le gouvernement du Canada agisse.
D’autres juridictions avant-gardistes ont adopté ou envisagent des lois qui:
- exigent des entreprises qu’elles préviennent les violations des droits humains,
- exigent des entreprises qu’elles mettent en œuvre des procédures adéquates de diligence raisonnable en matière de droits humains,
- prévoient des conséquences significatives pour les entreprises qui se comportent mal, et
- aident les personnes lésées à obtenir réparation.
Le Canada doit se joindre à ces juridictions et travailler à l’élaboration d’une législation complète et solide pour lutter contre le travail forcé, le travail des enfants et les autres graves violations des droits humains qui affectent actuellement les produits sur les étagères canadiennes.
Heureusement, il existe un autre projet de loi au Parlement qui pourrait changer la donne. Le projet de loi C-262, la Loi sur la responsabilité des entreprises de protéger les droits de la personne (ou le « projet de loi sur les droits humains et l’imputabilité »), aurait pour effet :
- d’exiger des entreprises qu’elles préviennent les préjudices dans leurs activités et leurs chaînes d’approvisionnement mondiales,
- d’exiger des entreprises qu’elles mettent en place des procédures de diligence raisonnable adéquates,
- d’inclure des mesures d’application strictes pour ces obligations, et
- de donner aux individus affectés et aux travailleurs et travailleuses concernés le droit légal de poursuivre devant les tribunaux canadiens les entreprises négligentes ou qui causent des dommages.
C’est la loi dont le Canada a besoin pour mettre fin aux abus des entreprises et répondre au droit de recours des personnes concernées. C’est la loi que la société civile et les syndicats canadiens appuient. Le projet de loi C-262 est la loi que les membres du Parlement devraient appuyer et pour laquelle ils devraient voter.
En savoir plus
Voir le Tableau comparatif des projets de loi
À propos du RCRCE
Le Réseau canadien sur la responsabilité des entreprises (RCRCE) travaille pour faire en sorte que les compagnies canadiennes respectent les droits humains et l’environnement dans leurs activités à l’étranger. Il regroupe 40 organisations de la société civile et syndicats, dont l’AQOCI.
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