Montréal, le 6 février 2017
Lettre ouverte au très honorable Justin Trudeau, premier ministre du Canada
Aide publique au développement : Passerez-vous de la parole aux actes?
Monsieur le Premier Ministre,
À travers le monde, des millions de personnes mortes, blessées, violées, traumatisées, déplacées et réfugiées témoignent des conséquences des trop nombreux conflits et tensions qui perdurent. Trop de personnes vivent également des inégalités, la pauvreté, l’analphabétisme ou subissent l’impact des changements climatiques. Or, il est à la portée du Canada de devenir un acteur-clé en assurant la cohérence de ses politiques internationales et en passant de la parole aux actes. Malheureusement, à l’heure actuelle, notre pays est loin de respecter ses engagements en matière d’aide publique au développement (ADP) et de jouer un rôle de leader à cet égard.
En 1969, l’ex-premier ministre Lester B. Pearson a dirigé la commission de l’ONU qui a recommandé que les pays les plus riches consacrent 0,7 % de leur revenu national brut (RNB) à l’ADP. Le Canada n’est jamais parvenu à respecter cette promesse. Aujourd’hui, le Canada occupe la 14e place parmi les 28 pays donateurs de l’OCDE. Le niveau de l’aide est même plus bas actuellement que sous le gouvernement précédent. Si le Royaume-Uni a réussi à atteindre la cible de 0,7 % malgré ses difficultés économiques, comment justifier que le Canada n’a contribué que 0,26 % de son RNB en 2016? Lors de la campagne électorale de 2015, en réponse à notre question sur votre engagement à respecter cette promesse jamais tenue, vous nous avez répondu « qu’un gouvernement libéral s’engagera fermement à respecter cette obligation incombant au Canada en tant que nation capable d’apporter un changement. »
Nous saluons votre détermination à rétablir la réputation du Canada à l’échelle internationale et nous croyons que, pour y arriver, des actions doivent être mises en oeuvre dès 2017 pour augmenter le financement de l’aide internationale. Il est essentiel d’agir dès maintenant et nous pensons qu’il est tout à fait réalisable de hausser le budget de l’aide de manière graduelle, soit 15 % par année, pour atteindre l’objectif de 0,7 % du RNB d’ici 10 ans.
Nous encourageons notamment votre intention d’injecter plus de fonds dans le domaine de la santé reproductive, conjointement avec d’autres pays donateurs, pour pallier la réduction du financement américain à cet égard au niveau international. Comme la ministre du Développement international, Madame Marie-Claude Bibeau, nous croyons qu’assurer aux femmes et aux filles l’égalité et le plein exercice de leurs droits est une priorité. Une augmentation significative du financement en ce sens permettrait à des milliers de femmes et filles de réaliser leur plein potentiel et de contribuer ainsi au progrès économique et social de leurs communautés et nations. En 2015, le Canada, de concert avec la communauté internationale, a adopté un ensemble d’objectifs de développement durable pour éradiquer la pauvreté, protéger la planète et garantir les droits et la prospérité pour toutes et tous dans le cadre d’un vaste plan d’action. Pour chaque objectif, des cibles spécifiques doivent être atteintes d’ici 2030. Pour y arriver, les gouvernements, tout comme la société civile, doivent s‘engager. Les organismes de coopération et de solidarité internationales du Québec sont déjà à pied d’oeuvre, à l’étranger et au niveau local, pour réaliser ces objectifs. Nous nous attendons à ce que notre gouvernement emboîte le pas et respecte ses obligations en haussant substantiellement l’aide publique au développement sans plus attendre.
Monsieur Trudeau, nous espérons que vous mettrez tout en oeuvre pour respecter vos engagements de la campagne électorale de 2015 et que nous pourrons rapidement constater les actions qui en découleront.
L’Association québécoise des organismes de coopération internationale du Québec (AQOCI),
Marie-Pierre Nogarède
Présidente du CA
Norman MacIsaac
Président du CA
Les commentaires sont fermés.