Un portrait des ONG canadiennes en développement international
Ces derniers jours, les déclarations du ministre de la Coopération internationale du Canada relayées par la presse auraient bien pu porter la population canadienne à croire que les ONG sont un groupe d’organisations dépendantes et égoïstes qui « s’imaginent que l’ACDI (l’Agence canadienne de développement international) n’est là que pour [les] garder en vie ».
Voilà un portrait peu fidèle d’un secteur dynamique qui, depuis plusieurs décennies, bénéficie du soutien de centaines de milliers de Canadiens. Et à juste titre : le travail des ONG dans les pays en développement reflète l’importance que revêt pour les Canadiens la lutte contre la pauvreté mondiale et les questions qui y sont liées. Selon un sondage mené en mars dernier par Vision Critical, la majorité des Canadiens croient que la réduction de la pauvreté mondiale aurait des répercussions dans d’autres domaines, notamment le respect des droits de la personne, le renforcement de la réputation internationale du Canada, la réduction des conflits à l’étranger et la diminution des risques de pandémie.
Le Canada compte plus de 800 oeuvres de bienfaisance et ONG actives en développement international. À elles toutes, elles emploient plus de 8 500 professionnels à temps plein au Canada, sans compter les dizaines de milliers de bénévoles et de stagiaires qu’elles mobilisent, au pays comme à l’étranger, pour apporter un soutien technique à leurs partenaires de développement. Les ONG canadiennes oeuvrent dans plus de 140 pays en développement, où elles apportent de l’aide humanitaire et mettent en place avec l’aide de partenaires locaux des programmes de développement à long terme.
Ces organisations bénéficient du soutien ferme des Canadiens de toutes conditions, qui manifestent leur appui par leur bénévolat, leur engagement public, leurs dons et bien d’autres manières encore. En fait, les Canadiens remettent plus d’un milliard de dollars par an aux organismes de bienfaisance enregistrés travaillant au développement international, soit presque trois fois ce que ces derniers reçoivent de l’ACDI. Les ONG reçoivent également environ 180 millions par an de fondations privées et plus ou moins 40 millions des administrations municipales et des gouvernements provinciaux. Quant à l’ACDI, elle a versé en 2010-2011 environ 525 millions de dollars aux ONG canadiennes (exception faite des universités, des collèges et des instituts spécialisés), soit un peu moins de 16 % de tout le budget alloué au financement de programme. Et tout comme c’est le cas pour d’autres secteurs financés par l’ACDI, ces subventions ont un important effet de levier quand vient le temps de mener des campagnes auprès de la population canadienne et d’autres donateurs pour récolter plus de fonds, et ainsi maximiser les retombées et les résultats.
Le personnel des ONG est constitué d’agents de changement social professionnels, passionnés et engagés. Leurs organisations, de taille et de vocations variées, sont souvent mieux outillées que d’autres organismes de développement international pour répondre à des contextes changeants. Les ONG sont capables d’autocritiques et d’introspection, elles savent apprendre de
leurs erreurs lorsque les choses tournent mal, ce qui ne manque pas d’arriver de temps à autre, compte tenu de la complexité des situations.
La transparence et la responsabilité ont une grande importance pour elles. La plupart des organisations sont soumises à des évaluations et à des vérifications rigoureuses par l’ACDI et d’autres donateurs, et se sont dotées de mécanismes perfectionnés pour rendre des comptes à leurs donateurs et partenaires. Pour sa part, le Conseil canadien pour la coopération internationale (CCCI) – une plateforme nationale d’organismes de développement international – exige de ses membres qu’ils se conforment à son Code d’éthique et à ses normes de fonctionnement. Ce code encadrant les ONG oeuvrant au développement est parmi les plus anciens et les plus solides au monde.
Les ONG canadiennes ont contribué à bâtir la réputation internationale d’innovation, d’efficacité et d’avant-gardisme du Canada dans son appui à certaines des communautés les plus pauvres et les plus marginalisées du monde. Ces organisations se sont faites les championnes de l’égalité des sexes partout sur la planète et ont mené des initiatives en matière de maintien de la paix et de droits de la personne. Elles ont acquis une expertise dans des domaines essentiels comme la sécurité alimentaire, le développement coopératif, le microcrédit, la santé, l’éducation, la saine gestion publique et la formation professionnelle. Les ONG canadiennes sont présentes dans les zones de conflit, dispensant un précieux soutien aux réfugiés et aux personnes déplacées. Elles se sont portées au secours de pays dévastés par des catastrophes d’origine naturelle ou humaine. Et, peut-être plus que tout le reste, elles se sont unies à des groupes de la société civile de partout dans le monde pour revendiquer des changements profonds et durables, la démocratie, le respect des droits de la personne et des droits économiques, et la fin de l’injustice et des guerres.
Pendant des années, les contribuables canadiens ont investi dans le développement et le renforcement des capacités d’un vaste ensemble d’ONG canadiennes qui, à leur tour, ont su obtenir des résultats et se rendre utiles sur le terrain. Maintenant que nous devons tous nous adapter aux réalités changeantes de l’aide étrangère et du développement, les ONG ont encore besoin du soutien de la population canadienne et de leur gouvernement. Ainsi, comme par le passé, elles continueront d’apporter une contribution essentielle au succès du programme de développement international du Canada.
Julia Sánchez
Présidente-directrice générale
Conseil canadien pour la coopération internationale
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