Du 30 novembre au 13 décembre 2023 se tenait la 28e Conférence des Parties sur les changements climatiques (COP28). Parmi les différents groupes de la société civile des quatre coins du globe qui se sont rassemblés à ce sommet international, le Congo Basin Conservation Society (CBCS-Network) s’est efforcé de faire entendre les voix et les revendications de ses membres.
Présentation du partenaire
Le Congo Basin Conservation Society (CBCS-Network) est une organisation de la société civile congolaise qui a pour mission d’aider et de sensibiliser les communautés aux services environnementaux pour une gestion responsable et durable des écosystèmes du bassin du Congo. En tant qu’organisation philanthropique de droit congolais, le CBCS-Network s’engage activement dans la promotion des objectifs de développement durable. L’organisation envisage de devenir une plateforme clé pour améliorer les services relatifs à la conservation de l’environnement et des écosystèmes dans le bassin du Congo. En favorisant l’harmonie entre les communautés locales et la nature, le CBCS-Network cherche à faire tomber les barrières régionales entre une diversité d’acteurs et d’actrices, se positionnant comme une force motrice dans la poursuite d’une coexistence équilibrée et durable dans la région.
Principales revendications à la COP28
La COP28 s’est profilée comme un rendez-vous crucial pour le CBCS-Network. En tant qu’acteur important de la société civile, le CBCS-Network souligne que parmi les revendications de son organisme dans le contexte des enjeux du bassin du Congo, deux requêtes principales et transversales ressortent particulièrement : l’accès et l’obtention de ressources financières de manière souple et flexible et la reconnaissance de l’importance de sauvegarder les forêts et les écosystèmes du bassin du Congo.
L’un des défis majeurs auquel le CBCS-Network, et la société civile du bassin du Congo plus largement, sont confrontés est l’accès limité aux ressources financières. S’il existe des mécanismes en faveur de la protection des forêts et des communautés, très peu d’organisations voient la couleur de ces financements, notamment en raison d’un trop grand nombre d’intermédiaires aux niveaux gouvernementaux (international, national, local). Comme le mentionne le CBCS-Network, l’argent offert par la communauté internationale n’arrive pas à la destination, ce qui constitue actuellement un frein à la réalisation des résultats escomptés de protection des forêts et écosystèmes du bassin du Congo sur le terrain.
Ainsi, pour répondre à cet enjeu, une des revendications du CBCS-Network est la demande de mécanismes de financement souple et novateur, spécifiquement pour la société civile, les communautés locales, les populations autochtones et à la recherche scientifique. Pour mieux conserver les riches écosystèmes du bassin du Congo, les paysages forestiers, les tourbières, les zones humides et les autres zones de grande valeur écologique nécessitent des mécanismes de financement souples et innovants pour garantir que les fonds parviennent directement aux communautés locales les premières concernées, ce qui n’est pas le cas actuellement. Le CBCS-Network insiste sur la nécessité de réadapter et redéfinir les modes de soutien, notamment financier, préconisant des fonds directs à la société civile, aux communautés locales, aux populations autochtones et à la recherche scientifique.
Un autre défi est le manque de reconnaissance à l’égard de l’importance de la préservation des forêts et des écosystèmes du Bassin du Congo. Le CBCS-Network insiste sur le rôle crucial du bassin du Congo dans la lutte contre la crise climatique. En effet, selon le CBCS-Network, le bassin du Congo couvre une superficie estimée à plus de 237 millions d’hectares de forêts qui se déploie à travers six pays, à savoir le Cameroun, la République centrafricaine, la République démocratique du Congo (RDC), la République du Congo, la Guinée équatoriale et le Gabon. Cette région est cruciale pour atténuer les effets de la crise climatique, stockant même plus de carbone que l’Amazonie. L’impact de la couverture forestière de la RDC est significatif tant au niveau des services écosystémiques mondiaux que nationaux. Cependant, la déforestation dans les forêts du bassin du Congo a atteint un niveau alarmant ces dernières années, menaçant ce poumon de l’Afrique et, par extension, l’ensemble de la planète.
Le CBCS-Network identifie la RDC comme un pays-solution aux désastres climatiques pour plusieurs raisons. Quelques-unes résident dans le vaste couvert forestier de la RDC qui joue un rôle crucial dans la séquestration de carbone, contribuant ainsi à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre responsables de la crise climatique. De plus, le territoire de la RDC abrite une biodiversité exceptionnelle et des écosystèmes uniques au monde, ce qui témoigne de son importance dans la préservation à l’échelle mondiale. En tant que deuxième pays mondial pour la sauvegarde des écosystèmes, la RDC est vue comme un acteur clé dans la recherche de solutions aux défis climatiques mondiaux. Cette revendication de reconnaissance est enfin en étroite relation avec la première où une mobilisation des ressources financières en faveur de la préservation des forêts et des écosystèmes du bassin du Congo est primordiale.
Perspectives du CBCS-Network sur les résultats de la COP28
Les résultats de la COP28, en relation avec les revendications clés du CBCS-Network, touchent notamment la pression de prendre des engagements politiques à l’égard de la crise climatique exercée sur les instances politiques nationales, le rôle crucial de la société civile dans la transition énergétique et dans la surveillance des progrès et la création d’espaces civiques mondiaux de solidarité et de réseaux vue comme essentielle pour échanger, collaborer et maintenir la pression sur les instances politiques.
Un moment marquant témoignant d’une avancée lors de la COP28, pour le CBCS-Network, fut l’annonce et le lancement du partenariat Peuples, forêts et nature : Partenariat pour la nouvelle économie climatique de la République démocratique du Congo, soutenu par des partenaires nationaux et internationaux avec un engagement financier initial de 62 millions de dollars. Bien que le CBCS-Network félicite le gouvernement et ses ambitions financières, puisqu’il s’agit notamment d’un premier pas important, une question demeure encore dans la tête des acteurs et actrices : comment les organisations de la société civile, les organisations communautaires locales, les peuples autochtones et la recherche scientifique auront accès à ces fonds, de manière directe, pour financer les initiatives visant la préservation des forêts et des écosystèmes du bassin du Congo? Selon le CBCS-Network, il faudra surtout s’assurer que les fonds percolent de manière concrète jusque dans ces organisations. Face à l’annonce de la mise sur pied de ce fonds, l’organisation met en garde entre ce qui est dit en théorie et ce qui est fait en pratique, mettant en lumière la nécessité de stratégies transparentes entre les donateurs et le gouvernement de la RDC. La question de la transparence devient cruciale pour éviter le manque de redevabilité. En ce qui concerne la nécessité de mettre en place des mesures de financements souples, flexibles et innovantes pour soutenir des actions concrètes, il reste encore beaucoup de travail à faire entre les acteurs et actrices.
Le CBCS-Network rappelle ensuite que les campagnes et les pressions de la société civile ont joué un rôle crucial pour attirer l’attention sur l’urgence de la transition vers une réduction des énergies fossiles. À la COP28, le CBCS-Network, qui avait aussi comme objectif de ne pas laisser toute la place aux lobbyistes, surtout les pétroliers et gaziers, s’est dit satisfait du travail de la société civile pour assurer et mettre de la pression vis-à-vis de la transition énergétique. Face à ces engagements, les progrès devront toutefois être suivis de très près pour assurer des actions concrètes vers une réelle réduction des énergies fossiles.
Un autre résultat de la COP28 pour le CBCS-Network est la création d’espaces de solidarité et de plateformes de réseaux communs entre les personnes et les organisations alliées à l’échelle mondiale : une mobilisation essentielle pour échanger sur les pratiques et maintenir la pression en vue d’attendre des résultats significatifs. La COP28 a été un terrain fertile pour favoriser le réseautage avec diverses personnes et organisations alliées aux niveaux international, national et local. À titre d’exemple, les rencontres entre acteurs et actrices des trois grands bassins forestiers mondiaux – tels que le bassin du Congo, de l’Amazonie et du Mékong – ont permis d’échanger sur des pratiques de préservation forestière inspirantes. Comme le mentionne le CBCS-Network, en favorisant des espaces de solidarité et des échanges d’expériences, cela permet d’élargir les discussions sur l’implication de la jeunesse, des populations autochtones, des femmes, etc. dans la lutte contre la crise climatique. Le renforcement des capacités, la formation en ligne et le partage de pratiques forestières sont également des aspects essentiels de coopération. En cultivant des espaces et des plateformes de réseaux partagés et solidaires à l’échelle mondiale, cela permet donc d’échanger des pratiques inspirantes et innovantes en plus de maintenir une pression collective auprès d’instances politiques et élues pour exiger des résultats concrets.
Activités prévues par le CBCS-Network en 2024
Pour donner suite à la COP28, dans les mois à venir, le CBCS-Network s’engage à maintenir une mobilisation active sur les enjeux climatiques. Pour ce faire, il a par exemple élaboré des stratégies de mobilisation qui débute par des actions à l’interne du pays, c’est-à-dire aux niveaux local et national. Par exemple, il envisage de renforcer le réseau dynamique de la société civile en organisant un forum national avec les actrices et acteurs locaux importants qui aura comme objectif de consolider la position claire de la société civile face aux défis environnementaux. Des réunions au niveau national pour discuter de la contribution de l’agroécologie à la résolution des crises climatiques, à la conservation de la biodiversité et à la réduction des catastrophes climatiques seront tenues. Une réunion de deux jours est prévue pour la restitution des événements de la COP28, où une feuille de route d’action sur trois ans sera également élaborée. Cette feuille de route vise à fournir des actions et des solutions concrètes au gouvernement congolais, avec une vision à long terme jusqu’en 2030 – année visée par la concrétisation du Fonds pour les pertes et préjudices. L’organisation souhaite également travailler de près avec les groupes de personnes congolaises responsables des négociations lors des COP. L’organisation des retraites entre les élus et élues du peuple et les groupes composés d’acteurs et d’actrices de la société civile sont donc prévus pour formuler des recommandations claires en matière de climat et de préservation des forêts et écosystèmes du bassin du Congo qui incluent les demandes et besoins de la société civile. Des mesures, comme la feuille de route, seront par ailleurs utiles pour mener des actions de plaidoyer dans les prochains mois et les prochaines années, et notamment à la COP29 de 2024.
Au niveau continental et international, le CBCS-Network compte élargir sa démarche et sa perspective pour inclure les autres pays impliqués dans la protection du bassin du Congo, voir même à constituer un bloc commun pour exercer une pression collective. En tant que groupes de pression, l’objectif sera surtout de continuer à se réunir, à s’influencer mutuellement, à renforcer les réseaux de solidarité, et à rester mobilisés en faveur de solutions climatiques réellement durables.
Pour le CBCS-Network, la participation à la prochaine COP demeure donc cruciale pour continuer de créer des alliances et des liens de solidarité avec des acteurs et actrices mobilisées pour la justice climatique et d’influencer les négociations internationales, notamment sur les énergies fossiles, pour exiger des résultats concrets. Le CBCS-Network tient, par ailleurs, à remercier l’Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI), pour son soutien enthousiaste à la COP28; un exemple qui témoigne d’une solidarité internationale.
Cet article a été co-écrit en partenariat avec Katherine Robitaille, déléguée jeunesse à la COP28 de l’AQOCI et chargée de projets à la Chaire Claire-Bonenfant – Femmes, Savoirs et Sociétés de l’Université Laval et Josué Aruna, Ladislas Witanene et Anne-Marie Milondo du Congo Basin Conservation Society (CBCS-Network).
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